Trump et la démocratie : l'Amérique au bord du précipice
De l'assaut du Capitole à l'immunité présidentielle, les institutions américaines sont mises à l'épreuve
"La force de la Constitution réside entièrement dans la détermination de chaque citoyen à la défendre. Ce n'est que si chaque citoyen se sent tenu de participer à cette défense que les droits constitutionnels sont garantis.". Albert Einstein
Ce qui devait être un bref article sur les récents développements juridiques concernant l'immunité présidentielle et les preuves d'insurrection aux États-Unis s'est transformé en une exploration approfondie des enjeux démocratiques actuels.
Au cours de l'été, Coralie et moi-même nous sommes plongés dans une recherche minutieuse qui a révélé des interconnexions complexes et des implications profondes pour l'avenir de la démocratie américaine. Ce que nous avons découvert nous a poussés à élargir considérablement la portée de notre analyse.
Le résultat de ce travail est l'article détaillé que vous avez devant vous. Notre objectif est double : partager l'étendue de nos recherches et offrir une perspective éclairée sur les défis potentiels auxquels une démocratie établie peut être confrontée.
Nous vous invitons à nous accompagner dans cette exploration approfondie du paysage politique américain contemporain, ses complexités juridiques, et ses implications pour l'avenir de la gouvernance démocratique.
La Constitution américaine de 1789 occupe une place unique dans l'Histoire. Elle est bien plus qu'un simple texte fondateur de l'organisation juridique et politique du pays. Sa longévité et sa flexibilité sont remarquables. Son système d'amendements lui permet de s'adapter aux évolutions sociétales. Cette Constitution a eu une influence mondiale, inspirant de nombreux autres pays. Les Américains y sont profondément attachés. Elle défend des valeurs essentielles : fédéralisme, droits individuels, séparation des pouvoirs et unité nationale. Elle affirme aussi la souveraineté populaire, renforçant ainsi les bases démocratiques. Au-delà de son cadre légal, elle représente un véritable socle identitaire pour les citoyens américains. Cependant, les actions récentes de Trump semblent pousser certains de ses partisans à en négliger l'importance.
Nous allons dans cet article tenter d’exposer l’ensemble des faits, la chronologie et surtout ce que cela signifie pour la démocratie américaine.
TL:DR:
Le 6 janvier 2021, le Capitole à été investi par environ 2300 manifestants. Cette attaque dans son individualité ne représente pas une insurrection. Or, les actions menées par Donald Trump durant cette journée et les jours de préparation qui ont mené à cet événement historique sont sans appel: il s’agissait bel et bien d’une tentative d’insurrection et d’obstruction au paisible transfert de pouvoir.
Nous reviendrons alors sur cet évènement avant d’évoquer la procédure judiciaire qui a contribué à l’immunité quasi-absolue de l’ancien président, et la réinterprétation de la Constitution des États-Unis qui permet aujourd’hui à Donald Trump de rester dans la course présidentielle et de ne jamais devoir répondre de ses actes.
Sommaire
I. Historique des contestations et du déni de certaines élections par Trump
II. Retracement de l’élection 2020
B/ Le déroulement des évènements précédant l’insurrection du 6 janvier 2021
C/ Le 6 janvier 2021 : La journée où la démocratie américaine a vacillé
III. Évolution sans précédent du pouvoir exécutif américain avant le procès
A/ Rappel Système juridique américain
B/ TRUMP v. UNITED STATES No. 23–939
IV. Perspectives sur l’avenir
I. Historique des contestations et du déni de certaines élections par Trump
Pour faire croire un mensonge, il faut juste le répéter suffisamment de fois pour qu’il devienne une évidence. C’est exactement la stratégie qu’a employée Trump pour donner raison au pays de ne pas participer au paisible transfert du pouvoir lors de l'insurrection du 6 janvier 2021.
Déjà en 2012, avant même que Trump ne fasse son entrée dans le paysage politique américain, plusieurs tweets contestant le résultats de l’élection annonçant Barack Obama élu pour son second mandat ‘we should march on Washington’ devient soudain une prophétie qui se réalisera 9 ans plus tard…
En 2016 également, alors que Trump a déjà gagné l’élection mais n’a pas gagné le popular vote (le nombre de votants total) il déclare sur Twitter et lors d’interview sur Foxnews que les résultats seraient truqués, que les démocrates ont utilisé des voteurs morts, des immigrants illégaux, que les républicains ont gagné une élection contre des tricheurs.
De 2017 à 2018, Trump a même créé un organisme nommé Presidential Advisory Commission on Election Integrity aussi appelé la Voter Fraud Commission, qui n’a jamais réussi a trouvé une seule preuve de fraude.
II. Retracement de l’élection 2020
A/ Première étape : Le plan des Faux électeurs
Beaucoup d’entre-vous résument l’attaque du Capitole comme le seul élément de l’insurrection de Donald Trump. Il ne s’agit seulement que de la face immergée de l’iceberg. Nous allons vous exposer le plan de cette opération dans son intégralité, avec les sources et le déroulement pas à pas de cet événement historique.
Kenneth Chesebro était un avocat du Wisconsin qui a commencé à travailler pour la campagne de Trump aux alentours du 9 novembre 2020, il est responsable de l’écriture des premiers mémos présentant une stratégie que pourrait employer Trump en cas de défaite de l'élection pour se maintenir président. Eastman et lui ont préparé un plan de faux électeurs conçu pour créer un récit alternatif qui pourrait potentiellement perturber la certification des résultats de l'élection présidentielle de 2020 en faveur de Donald Trump.
1. Création de listes alternatives d'électeurs
Électeurs alternatifs : Dans sept États clés où Trump a perdu (Arizona, Géorgie, Michigan, Nevada, Pennsylvanie, Wisconsin et Nouveau-Mexique), l'équipe juridique de Trump a coordonné avec des républicains locaux la création de listes alternatives d'électeurs. Ces individus prétendaient faussement être les électeurs légitimes représentant leur État. (Vidéo à l’appui)
Réunion du 14 décembre : Le plan exigeait que ces faux électeurs se réunissent le 14 décembre 2020 (le même jour que les électeurs légitimes) et votent pour Donald Trump. Ces votes ont ensuite été envoyés au Congrès et aux Archives nationales, imitant le processus utilisé par les électeurs légitimes. (Source page 378)
2. Transmission de faux certificats
Certificats de vote : Les faux électeurs de chaque État ont créé des documents qui prétendaient être la certification officielle des votes électoraux pour Trump. Ces certificats ont été transmis au Congrès et aux Archives nationales comme s'il s'agissait des votes électoraux légitimes de ces États.
3. Base légale et justification
Argument juridique : Chesebro et d'autres alliés de Trump, en particulier John Eastman, ont soutenu que ces listes alternatives d'électeurs pouvaient être justifiées par la théorie selon laquelle si les contestations juridiques en cours dans ces États aboutissaient, ces électeurs seraient légitimes. Ils ont également affirmé que l'existence de listes concurrentes d'électeurs créerait une situation où le vice-président ou le Congrès pourrait décider quelle liste d'électeurs reconnaître.
Electoral Count Act : Le plan s'appuyait sur une interprétation contestée de l'Electoral Count Act de 1887, qui régit le processus de comptage des votes électoraux au Congrès. L'idée était que s'il y avait des listes concurrentes d'électeurs d'un État, le Congrès devrait décider quelle liste reconnaître. Chesebro et Eastman ont soutenu que le vice-président Mike Pence, qui présidait la session conjointe du Congrès, pourrait rejeter les électeurs de Biden en faveur des électeurs de Trump ou renvoyer la décision aux États.
4. Le rôle de Mike Pence
Faire pression sur Pence : Le plan exigeait que Pence, dans son rôle de président du Sénat, prenne la mesure extraordinaire de rejeter les électeurs légitimes de ces États contestés et :
soit reconnaisse les listes alternatives,
soit refuse de compter les votes électoraux de ces États.
Arguments juridiques pour Pence : Eastman et Chesebro ont soutenu que le vice-président avait l'autorité constitutionnelle de décider quels votes électoraux compter, malgré l'absence de précédent ou de base juridique pour une telle action. Ils ont affirmé que l'Electoral Count Act était inconstitutionnel et que Pence pouvait agir unilatéralement ou avec le Congrès pour décider quels électeurs reconnaître.
5. Perturber le processus de certification
Créer de la confusion : En soumettant ces listes alternatives, l'équipe de Trump espérait créer suffisamment de confusion et de retard dans le processus de certification pour que le décompte électoral puisse être arrêté ou renvoyé aux législatures des États afin de décider du résultat. L'objectif était de créer une situation où les législatures des États contrôlées par les républicains pourraient intervenir et soumettre leurs propres listes d'électeurs de Trump.
Élection contingente à la Chambre : Dans le scénario le plus extrême, si suffisamment de votes électoraux d'États étaient rejetés ou si aucun candidat n'atteignait les 270 votes électoraux requis, l'élection serait décidée par la Chambre des représentants, où les républicains contrôlent une majorité des délégations d'État.
B/ Le déroulement des évènements précédant l’insurrection du 6 janvier 2021
1. Utilisation intensive des médias sociaux
Trump a utilisé Twitter comme principal outil de communication pour diffuser son message et mobiliser ses partisans.
Dans les semaines précédant le 6 janvier 2021, Donald Trump a orchestré une campagne intensive sur les réseaux sociaux, principalement via Twitter, s'inscrivant dans la continuité de ses contestations électorales passées. Trump a publié des centaines de tweets, articulant sa stratégie autour de plusieurs axes. Il a constamment promu des allégations infondées de fraude électorale, qualifiant l'élection de "plus grande ARNAQUE de l'histoire de notre nation" et diffusant un rapport prétendant prouver une fraude massive. Parallèlement, il a activement encouragé ses partisans à se rassembler à Washington D.C. Le 6 janvier, promettant une manifestation qui serait "sauvage" et utilisant des hashtags comme #MarchForTrump et #StopTheSteal. Trump a également exercé une pression considérable sur les élus républicains, les exhortant à contester les résultats de l'élection et menaçant publiquement ceux qui s'y opposaient. Il a promu diverses théories du complot, suggérant l'implication de puissances étrangères dans le piratage des machines de vote, et encourageant ses partisans à ne faire confiance qu'aux médias d'extrême droite. Dans les jours précédant le 6 janvier, Trump a intensifié la pression sur le vice-président Mike Pence, affirmant faussement que celui-ci avait le pouvoir de rejeter les électeurs "frauduleusement choisis". Il a cherché activement à rallier les élus républicains à sa cause, remerciant publiquement ceux qui soutenaient ses efforts et annonçant de nouvelles adhésions au groupe #StopTheSteal. Cette campagne de désinformation et de mobilisation a créé un climat de tension extrême, culminant le 6 janvier avec un rassemblement où Trump a prononcé un discours incendiaire devant des milliers de partisans, juste avant que certains d'entre eux ne prennent d'assaut le Capitole, dans une tentative ultime de perturber la certification des résultats de l'élection par le Congrès.
2. Réunion du 3 janvier à la Maison Blanche
Un événement crucial s'est produit le 3 janvier lors d'une réunion dramatique dans le Bureau Ovale. Jeffrey Clark, un avocat du ministère de la Justice, a plaidé pour devenir le nouveau procureur général, promettant de soutenir les allégations de fraude de Trump. Cependant, tous les autres responsables présents ont menacé de démissionner si Clark était nommé, ce qui a finalement dissuadé Trump de procéder à ce changement.
Cette campagne intensive de désinformation, de pression politique et de mobilisation a culminé avec le rassemblement du 6 janvier à Washington D.C., où Trump a prononcé un discours incendiaire juste avant que ses partisans ne prennent d'assaut le Capitole des États-Unis.
C/ Le 6 janvier 2021 : La journée où la démocratie américaine a vacillé
La journée du 6 janvier 2021 restera gravée dans l'Histoire politique américaine comme un moment de crise profonde pour la démocratie. Ce jour-là, le Capitole des États-Unis, symbole du pouvoir législatif et de la démocratie américaine, a été pris d'assaut par des partisans de Donald Trump. Cette insurrection n'était pas un événement spontané, mais l'aboutissement d'une campagne prolongée de désinformation et de manipulation orchestrée par Trump et ses alliés, visant à renverser les résultats de l'élection présidentielle de 2020.
1. Préparatifs et montée des tensions :
Dès les premières heures de la journée, les signes avant-coureurs de la violence à venir étaient visibles. À 6h00, des partisans de Trump ont commencé à ériger une potence (la structure utilisée pour pendre les criminels) symbolique devant le Capitole, un geste sinistre qui présageait les événements à venir. Peu après, à 6h27, Stewart Rhodes, le leader charismatique des Oath Keepers, un groupe d'extrême droite composé en grande partie d'anciens militaires et policiers, informait ses membres via un chat Signal crypté de la présence de "forces de réaction rapide" (QRF) armées, stationnées stratégiquement aux abords de Washington D.C. Ces QRF étaient prêtes à intervenir avec des armes et des munitions, une préparation qui témoigne de la préméditation de la violence à venir.
Pendant ce temps, loin d'apaiser les tensions, le président Trump les attisait par une série de tweets incendiaires. À 8h17, il a publié un message faisant directement pression sur son vice-président, Mike Pence : "Tout ce que Mike Pence a à faire, c'est de les renvoyer aux États, ET NOUS GAGNONS. Fais-le Mike, c'est le moment du courage extrême!" Cette déclaration, qui demandait à Pence d'outrepasser ses pouvoirs constitutionnels pour renverser les résultats de l'élection, était non seulement contraire à la loi, mais aussi une incitation directe à la subversion du processus démocratique.
2. Le rassemblement "Save America" :
À 9h00, le rassemblement "March to Save America" a débuté à l'Ellipse, un parc situé près de la Maison Blanche. Des milliers de partisans de Trump s'y sont rassemblés, beaucoup ayant voyagé de loin pour participer à cet événement que le président avait promis être "sauvage". Parallèlement, vers 10h00, un groupe d'environ 100 Proud Boys, une organisation d'extrême droite connue pour sa rhétorique violente, s'est rassemblé près du Washington Monument. Contrairement à leur habitude, ils avaient adopté une tenue discrète pour se fondre dans la foule (ces derniers arborent généralement une tenue jaune et noir), une tactique qui suggérait une planification préalable.
La situation a pris un tournant encore plus inquiétant à 10h15, lorsque Tony Ornato, chef de cabinet adjoint de la Maison Blanche, a informé Mark Meadows, le chef de cabinet de Trump, que des participants au rassemblement étaient armés. Parmi les armes signalées figuraient des pistolets, des fusils, des bombes au poivre et même des lances. Malgré cette information alarmante, qui aurait dû déclencher une réponse immédiate des autorités, l'événement s'est poursuivi sans interruption ni mesures de sécurité supplémentaires.
3. Les discours incendiaires :
Vers 11h00, Rudy Giuliani, l'avocat personnel de Trump et ancien maire de New York, a pris la parole sur la scène de l'Ellipse. Dans un discours enflammé, il a appelé à un "procès par combat", une rhétorique belliqueuse qui a encore exacerbé les tensions déjà palpables dans la foule.
Trump a enchaîné à 11h58, prenant la parole pendant plus d'une heure. Son discours était rempli d'allégations infondées de fraude électorale, répétant des affirmations qui avaient été maintes fois démenties par les tribunaux et les responsables électoraux, y compris ceux de son propre parti. Il a exhorté ses partisans à "se battre comme des diables" pour "sauver" le pays, utilisant un langage de guerre qui, dans le contexte de la journée, ne pouvait être interprété que comme un appel à l'action directe. Trump a également continué à faire pression sur Mike Pence, insistant sur le fait que le vice-président avait le pouvoir de rejeter les résultats électoraux, une affirmation totalement fausse d'un point de vue constitutionnel.
4. L'assaut sur le Capitole :
Les événements ont basculé dans la violence à 12h53, lorsque les Proud Boys ont franchi le périmètre extérieur du Capitole, engageant les premiers affrontements avec la police du Capitole des États-Unis (USCP). Cette action a marqué le début de l'insurrection proprement dite.
À 13h00, alors que la session conjointe du Congrès pour certifier l'élection débutait à l'intérieur du Capitole, la menace à l'extérieur s’est rapidement intensifiée. Les législateurs, ignorant encore l'ampleur du danger, ont commencé le processus de certification des votes électoraux.
La situation a dégénéré de manière spectaculaire à 14h13, lorsque les premiers émeutiers ont pénétré dans le bâtiment même du Capitole. Dominic Pezzola, un membre des Proud Boys, a brisé une fenêtre avec un bouclier anti-émeute volé, permettant aux insurgés de s'infiltrer dans le bâtiment. Cette brèche a rapidement conduit à une invasion massive du Capitole.
Peu après, le Sénat a été brusquement suspendu et le vice-président Pence a été évacué de la chambre. À l'extérieur, la foule scandait "Pendez Mike Pence", une menace directe contre la vie du vice-président.
À 14h44, la violence a atteint son paroxysme lorsqu'Ashli Babbitt, une partisane de Trump, a été abattue par un officier de police du Capitole alors qu'elle tentait de forcer une porte barricadée menant au lobby du Président de la Chambre. Cet incident tragique a souligné la gravité de la situation et le danger réel auquel étaient confrontés les législateurs et le personnel du Capitole.
5. La réponse de Trump :
Face à l'escalade de la violence, la réponse de Trump a été non seulement inadéquate, mais potentiellement encourageante pour les émeutiers. À 14h24, alors que le Capitole était déjà envahi, Trump a tweeté une critique de Pence, l'accusant de manquer de "courage" pour renverser les résultats de l'élection. Ce tweet, dans le contexte des menaces de mort proférées contre Pence, a été perçu par beaucoup comme une incitation à la violence.
Pendant plus de trois heures, Trump est resté largement inactif, regardant les événements se dérouler à la télévision depuis la salle à manger de la Maison Blanche. Malgré les appels répétés de son entourage, y compris de sa propre famille et de personnalités de Fox News, pour qu'il intervienne et demande aux émeutiers de se disperser, Trump n'a fait que des déclarations tièdes et tardives.
À 15h13, il a finalement tweeté une demande de rester pacifique, sans toutefois demander explicitement aux émeutiers de quitter le Capitole. Ce n'est qu'à 16h17, plus de trois heures après le début de l'émeute, que Trump a publié une vidéo demandant à ses partisans de rentrer chez eux. Même dans ce message, il a continué à affirmer que l'élection avait été "volée", alimentant ainsi les griefs qui avaient conduit à la violence en premier lieu.
6. La fin de la journée :
Vers 18h00, le Capitole a finalement été sécurisé par les forces de l'ordre, aidées par la Garde nationale qui n'avait été déployée que tardivement. Un couvre-feu est entré en vigueur dans Washington D.C., marquant la fin de l'insurrection active.
À 20h05, Mike Pence est retourné dans la chambre du Sénat pour reprendre la session, suivi par Nancy Pelosi qui a rouvert la Chambre des représentants à 21h00. Dans un acte de défiance face à l'insurrection, le Congrès a travaillé toute la nuit pour achever la certification des résultats de l'élection présidentielle.
Ce n'est que dans les premières heures du 7 janvier, à 3h32 du matin, que le Congrès a finalement terminé le décompte des votes électoraux. Le vice-président Pence a officiellement confirmé la victoire de Joe Biden, mettant fin à l'une des journées les plus sombres de l'histoire politique américaine récente.
Cette journée du 6 janvier 2021 marque ainsi un tournant dans l’histoire des Etats-Unis et ébranle la stabilité des institutions politiques et la confiance qui leur a jusqu’alors été accordée. Les piliers de la démocratie américaine sont mis à l’épreuve et les différences entre les factions américaines émergent davantage.
Voici un tableau excel très détaillé de tout les évènements: ici
III. Évolution sans précédent du pouvoir exécutif américain avant le procès
A/ Rappel Système juridique américain
Le système juridique américain repose sur un principe fondamental : la séparation des pouvoirs. Inscrite dans la Constitution de 1787, cette séparation distingue trois branches du gouvernement : l'exécutif (le président), le législatif (le Congrès composé du Sénat et de la Chambre des représentants) et le judiciaire (la Cour suprême et les tribunaux fédéraux).
Pour éviter les abus de pouvoir, un système de "checks and balances” a été mis en place. Chaque branche dispose de moyens pour limiter les autres. Par exemple, le président a le pouvoir de refuser de signer une loi adoptée par le Congrès, empêchant ainsi son entrée en vigueur. De son côté, le Congrès peut rejeter les propositions présidentielles ou même lancer une procédure de destitution. La Cour suprême, quant à elle, peut déclarer des lois inconstitutionnelles, mais ses juges sont nommés par le président et confirmés par le Sénat.
Cette interdépendance vise à garantir un équilibre des pouvoirs. Dans ce contexte, l'immunité présidentielle apparaît comme un mécanisme potentiel de ce système d'équilibres. Cependant, son utilisation et son étendue doivent être soigneusement encadrées pour ne pas compromettre l'équilibre fragile entre les trois branches du gouvernement.
B/ TRUMP v. UNITED STATES No. 23–939
Le procès Trump v. United States a marqué un tournant décisif dans l'histoire juridique et constitutionnelle des États-Unis, redéfinissant de manière substantielle les contours de l'immunité présidentielle et l'étendue des pouvoirs de l'exécutif. La décision rendue par la Cour Suprême, sous la direction du juge en chef John Roberts, a établi une nouvelle doctrine d'immunité présidentielle qui a considérablement élargi la portée des protections accordées au président, suscitant à la fois des éloges et des critiques virulentes.
1. Catégorisation novatrice des actions présidentielles :
La Cour a introduit une classification tripartite des actions présidentielles, chacune bénéficiant d'un niveau d'immunité distinct :
a) "Core powers" (pouvoirs fondamentaux) : Définition : Ce sont des actions "conclusives et exclusives" que seul le président peut effectuer en vertu de ses pouvoirs constitutionnels. Immunité accordée : Absolue. Ces actions sont placées entièrement hors de portée de toute poursuite judiciaire ou examen par le Congrès. Implications : Cette catégorie élargit considérablement le champ des actions présidentielles incontestables, renforçant de fait le pouvoir de l'exécutif face aux autres branches du gouvernement.
b) "Official acts" (actes officiels) : Définition : Ce sont des actions qui se situent à la "périphérie extérieure" du rôle présidentiel, tant qu'elles sont liées à "l'exercice effectif des pouvoirs du président". Immunité accordée : Présomptive. Le gouvernement doit prouver que la poursuite pénale de ces actes ne pose "aucun danger d'intrusion sur l'autorité et les fonctions de la branche exécutive". Implications : Cette catégorie crée une zone grise substantielle où les actions présidentielles sont difficiles à contester, même si elles semblent dépasser les limites traditionnelles du pouvoir exécutif.
c) "Unofficial acts" (actes non officiels) : Définition : Ce sont des actions que le président entreprend en tant que citoyen privé. Immunité accordée : Aucune. Implications : Bien que cette catégorie semble limiter l'immunité présidentielle, la difficulté à distinguer clairement les actes officiels des actes non officiels peut, dans la pratique, étendre l'immunité à des domaines auparavant considérés comme privés.
2. Extension significative de l'immunité pour les communications présidentielles :
La Cour a accordé une immunité absolue aux conversations entre le président et son procureur général (la discussion en question étant Trump qui menaçait de virer son procureur général si ce dernier n’acceptait pas les ballots de votes falsifiés), les qualifiant de relevant des pouvoirs "conclusifs et exclusifs" de l'exécutif. Cette décision élargit considérablement la portée du privilège exécutif, un concept juridique qui protège certaines communications au sein de l'exécutif de la divulgation.
Argumentation : Les partisans de cette décision soutiennent qu'elle est nécessaire pour garantir la franchise et la confidentialité des discussions au plus haut niveau de l'exécutif. Ils arguent que sans cette protection, les présidents pourraient être réticents à avoir des conversations franches et nécessaires sur des questions sensibles de sécurité nationale ou de politique.
Critique : Les opposants affirment que cette immunité absolue pourrait servir à masquer des actes répréhensibles ou des abus de pouvoir, rendant presque impossible la tenue de l'exécutif pour responsable de ses actions.
3. Restriction de l'examen des motifs présidentiels :
La Cour a statué que les tribunaux ne peuvent pas enquêter sur les motifs du président lors de la détermination de la nature officielle ou non officielle d'un acte.
Implications : Cette décision rend extrêmement difficile la poursuite d'un président pour des actes qui pourraient sembler officiels en surface, mais qui auraient des motifs illégaux sous-jacents.
Argumentation pour : Les défenseurs de cette position soutiennent qu'elle protège l'indépendance de l'exécutif et empêche des enquêtes motivées politiquement qui pourraient paralyser la présidence.
Critique : Les détracteurs affirment que cette restriction pourrait permettre à un président de déguiser des actes illégaux en actions officielles, créant ainsi un bouclier presque impénétrable contre les poursuites. C’est ce que Trump à fait : Donald Trump Says Fake Electors Scheme Was 'Official Act' - Newsweek
4. Élargissement de l'immunité présomptive :
La Cour a accordé une immunité présomptive à des actions qui, auparavant, auraient pu être considérées comme non officielles, comme les tentatives présumées de Trump d'influencer le vice-président Pence dans la certification des résultats électoraux.
Implications : Cette décision étend potentiellement l'immunité présidentielle à des domaines qui étaient traditionnellement considérés comme en dehors des fonctions officielles du président.
Débat : Alors que certains voient cela comme une protection nécessaire de l'autonomie présidentielle dans l'exercice de ses fonctions constitutionnelles, d'autres y voient un dangereux précédent qui pourrait permettre des abus de pouvoir sans possibilité de recours.
5. Restriction de l'utilisation des preuves :
La Cour a statué que les actions bénéficiant d'une immunité absolue ne peuvent être citées ou référencées dans aucune autre affaire pénale comme preuve.
Implications : Cette décision limite considérablement la capacité des procureurs à construire des affaires contre un président, même pour des actes non officiels.
Argumentation : Les partisans affirment que cette règle est nécessaire pour préserver pleinement l'immunité accordée aux actes présidentiels fondamentaux. Sans elle, l'immunité pourrait être contournée en utilisant ces actes comme preuves indirectes dans d'autres poursuites.
Critique : Les opposants soutiennent que cette règle pourrait entraver sérieusement la justice en empêchant l'utilisation de preuves pertinentes et importantes dans des affaires criminelles légitimes.
Arguments en faveur de la décision :
Protection de l'indépendance de l'exécutif : Les partisans affirment que cette immunité étendue est essentielle pour préserver la séparation des pouvoirs et permettre au président d'exercer ses fonctions sans crainte de représailles juridiques.
Prévention du harcèlement judiciaire : Ils soutiennent que sans ces protections, un président pourrait être constamment entravé par des poursuites judiciaires motivées politiquement.
Efficacité gouvernementale : L'argument est que cette immunité permet au président de prendre des décisions difficiles et potentiellement controversées nécessaires pour gouverner efficacement.
Critiques de la décision :
Incohérence historique et légale : La juge Sotomayor, dans son opinion dissidente, argue que cette immunité étendue n'est pas conforme à l'histoire constitutionnelle américaine et va à l'encontre de l'intention des fondateurs qui cherchaient à éviter une présidence monarchique.
Déséquilibre des pouvoirs : La juge Jackson souligne que cette décision, bien qu'elle prétende préserver la séparation des pouvoirs, accorde en réalité un pouvoir sans précédent à l'exécutif et à la Cour Suprême elle-même, potentiellement au détriment du Congrès et du principe de freins et contrepoids.
Obstacles à la responsabilité présidentielle : Les critiques affirment que cette décision rend presque impossible la poursuite d'un président pour des actes criminels commis dans l'exercice de ses fonctions, créant potentiellement une présidence au-dessus des lois.
Définitions ambiguës : La distinction entre actes officiels et non officiels reste floue, ce qui pourrait conduire à une application incohérente de la loi et à une extension progressive de l'immunité présidentielle.
Précédent dangereux : Certains craignent que cette décision ne crée un précédent qui pourrait être exploité par de futurs présidents pour justifier des abus de pouvoir.
En conclusion, la décision de la Cour Suprême dans l'affaire Trump v. United States représente une évolution majeure et controversée du pouvoir exécutif américain. Elle élargit considérablement l'immunité présidentielle, redéfinissant fondamentalement l'équilibre des pouvoirs et la notion de responsabilité exécutive dans le système constitutionnel américain.
Cette décision soulève des questions profondes sur la nature de la présidence américaine : Dans quelle mesure un président doit-il être protégé des poursuites pour exercer efficacement ses fonctions ? Où tracer la ligne entre la protection nécessaire de l'exécutif et la responsabilité devant la loi ? Comment concilier cette immunité étendue avec les principes démocratiques fondamentaux ?
Les implications à long terme de cette décision restent à voir, mais il est clair qu'elle aura des répercussions durables sur la façon dont le pouvoir présidentiel est compris, exercé et contesté aux États-Unis. Elle pourrait potentiellement remodeler la relation entre les branches du gouvernement et redéfinir les limites du pouvoir présidentiel pour les générations à venir.
6. Zoom sur le concept d'immunité présidentielle :
En 1982, lors dans l’affaire Nixon v. Fitzgerald et du Watergate, la Cour suprême avait statué que l’ancien président des États-Unis Richard Nixon bénéficiait d’une immunité présidentielle l'exonérant de toute responsabilité civile dans le cadre d’actes officiels. Elle qualifiait cette immunité d’“absolue” à condition toutefois que la responsabilité pénale ne soit pas en cause. A l’occasion des agissements de Donald Trump, la question se pose à nouveau, cette fois-ci concernant les poursuites pénales. Certes l’immunité présidentielle permet d’éviter et de minimiser les abus du judiciaire et du législatif sur l’exécutif, mais tout n’est en réalité que question d’équilibre. Quid si l’exécutif abuse de son immunité présidentielle ? L’immunité présidentielle connue jusqu’alors concernait les actes officiels civils. L’étendre aux actes relevant de poursuites pénales ne serait-il pas excessif ? Rendant ainsi le concept d’immunité présidentielle illégitime et moins éthique qu’il ne paraît ?
7. Difficulté de qualifier la notion d’acte officiel :
Si la Cour Suprême reconnait la présomption d’immunité présidentielle pour les actes officiels commis par un ancien président dans le cadre de ses fonctions, aucune information ne semble avoir été apportée s’agissant de la durée d’une telle immunité. La notion déterminante est donc “l’acte officiel”, qui s’il n’est pas qualifié de tel, ne peut alors permettre à un président des États-Unis d’échapper à sa responsabilité. Aucune définition juridique précise d’un acte officiel n’est donnée. Cette difficulté entraîne des retards dans les poursuites, compte tenu que la question de savoir si l’acte est officiel ou non est renvoyée aux tribunaux inférieurs. Il n’existe pas de liste exhaustive pour qualifier un tel acte, mais seulement un faisceau d’indices. Sont alors par exemple pris en compte la nature de l’acte, l’identité et la fonction de signataire, le contexte dans lequel il a été pris ainsi que sa finalité. Le seuil à partir duquel un acte devient officiel ou non officiel n’est pas non plus connu. Ces indices, bien que révélateurs, demeurent relativement subjectifs et peuvent être interprétés différemment selon les circonstances de chaque situation. La notion d’acte officiel est en constante mouvance et peut donc varier en fonction du paysage politique actuel.
8. Tentative vaine d’éclairer les notions :
La Cour Suprême des États-Unis, le 1er juillet 2024 a essayé de poser les limites aux notions d’immunité présidentielle, de présomption d’immunité et d’acte officiel. Elle a affirmé qu’il n’existait effectivement pas d’immunité pour les actes non officiels. Cependant, elle a constaté que Donald Trump bénéficiait tout de même d’un certain degré d’immunité, c'est-à-dire d’une présomption d’immunité pour certains actes. Elle ajoute qu’il dispose d’une immunité absolue pour les actes officiels relatifs à la responsabilité pénale. Les juges de la Cour insistent sur la distinction entre un acte officiel et non officiel mais mettent à l'ombre le fait d’évoquer une immunité “absolue”, qui jusqu'alors était un terme inconnu. Il convient de rappeler que cette immunité absolue dans le domaine pénal a été exigée par Trump lui-même, et semble donc inventée de toutes pièces à cette occasion. Le président de la Cour Suprême des États-Unis, John Roberts a argué à travers cette décision vouloir protéger la séparation des pouvoirs et que , "Au moins en ce qui concerne l'exercice par le président de ses pouvoirs constitutionnels fondamentaux, cette immunité doit être absolue". L’application de l’immunité présidentielle peut entraîner des conséquences radicales, comme l’annulation des condamnations de Trump, notamment concernant la falsification de certains documents. Cette tentative par la Cour Suprême d’éclaircir les notions a en réalité totalement provoqué l’effet inverse : davantage de confusion dans l’esprit des citoyens américains, des failles innombrables quant à la qualification des notions, l’affirmation d’une immunité présidentielle absolue pour les actes officiels pénaux qui jusqu’alors était inconnue, pas de distinction entre le régime applicable aux poursuites civiles et pénales, et une démarche échouée de distinction précise entre les actes officiels et non officiels.
D’autres problématiques se posent concernant ces diverses notions. En effet, il n’est pas porté de précision quant à la durée à partir de laquelle un ancien président ne peut plus bénéficier de l'immunité présidentielle. Est-t-elle intemporelle ?
La Cour, utilisant la notion “d’immunité absolue” pour les actes officiels pénaux dans les affaires à l’encontre de Donald Trump s’engage sur un terrain plus périlleux qu’elle ne le présume. Cette expression est dépourvue de fondement et soulève une forte contradiction. En se basant sur le principe que l’immunité présidentielle est intrinsèquement limitée et circonscrite, évoquer une “immunité absolue” reviendrait à exprimer un oxymore, combinant des termes quasi antinomiques (immunité qui doit être limitée, et absolue), créant davantage de confusion conceptuelle. Cette extension peut à terme altérer l’équilibre entre la protection de la fonction présidentielle et la responsabilité des présidents des États-Unis.
Ainsi, cette décision de la Cour suprême crée un précédent juridique significatif pouvant être utilisé à l’avenir comme argument afin de permettre aux présidents d’échapper à leur responsabilité pénale. Il est important de noter que jusqu’alors, tous les présidents des États-Unis agissaient dans la conviction qu’ils ne pouvaient pas se soustraire à une telle responsabilité. Sonia Sotomayor, juge à l’opinion dissidente aurait d’ailleurs exprimé ses inquiétudes de façon faussement ironique “Le président est désormais un monarque”. Neil Gorsush, juge assesseur de la Cour suprême des États-Unis, s’est également exprimé quant à l’importance de cette décision, déclarant “ Nous rédigeons une décision pour les générations à venir ”.
IV. Perspectives sur l’avenir
Le cumul des actions menées par Donald Trump et ses partisans a sans nul doute des impacts et enjeux considérables à plusieurs niveaux. Les conséquences des multiples discours de Donald Trump, entraînant une hostilité certaine envers le parti démocrate, sont drastiques.
D’un point de vue sociologique, la rhétorique polarisante de l’ex-président des Etats-Unis a conduit une grande partie du peuple américain le soutenant à développer un véritable “culte du président”. Donald Trump est en effet depuis les années 2011 avec le mouvement “birther” tendant à remettre en cause la citoyenneté américaine de Barack Obama, un personnage important du paysage politique américain. Qui plus est, sa capacité à rassembler en évoquant parfois tout haut ce que tout le monde pense tout bas, en osant dénoncer et en prônant la nécessité de la liberté d’expression protégée par l’article 1er de la Constitution des U.S.A lui a permis de monter en force, mais surtout de se démarquer des autres élus.
Qu’il s’agisse de la politique fiscale ou étrangère, de l’immigration, du commerce international, mais encore et surtout de l’affaire des faux grands électeurs et de l’assaut du Capitole du 6 janvier 2021, les actions qu’il a engagées s’inscrivent dans une orientation extrémiste tendant à donner au président des États-Unis quel qu’il soit les quasi pleins-pouvoirs. Il semble ainsi pertinent de considérer que désormais, un nombre trop important d’américains privilégie la politique de Trump qui n’a sans cesse montré ses limites et ses dangers, tout en négligeant l’importance des valeurs démocratiques et de l’équilibre entre les trois branches du gouvernement : l’exécutif, le législatif et le judiciaire.
Sur le plan politique, certaines interrogations demeurent sans réponse. Qu’en sera-t-il du système politique américain en cas de réélection de Donald Trump ? Les américains laisseront-ils un homme avide de pouvoir, assoiffé par l’envie de marquer l'Histoire des États-Unis et propageant de fausses informations à tout va prendre le pouvoir pour la seconde fois ? Serait-il capable, si réélu, de tenter de modifier le 22ème amendement de la Constitution afin d’élargir son mandat, transformant la démocratie actuelle (si tant est qu’elle demeure encore) en un véritable simulacre démocratique où l’illusion prime face à la réalité ?
Une telle réflexion, invraisemblable de premier abord, paraît en fait totalement justifiée. En effet, si le 17 mai 2024 lors d’une réunion de la National Rifle Association ce dernier avait évoqué l’idée d’entreprendre un troisième mandat, comment interpréter les paroles de Trump s’adressant à la communauté chrétienne citant “You won’t have to vote anymore” lors de sa prise de parole le 27 juillet dernier à un évènement organisé par le Turning Point action en Floride si ce n’est en estimant qu’il souhaite garder le pouvoir bien au-delà du mandat de 4 ans tel que prévu actuellement ? D’une autre manière, il semblerait plus abordable pour Donald Trump, s’il souhaite garder sa souveraineté, de faire élire son fils afin de garder indirectement le pouvoir plutôt que de changer la Constitution américaine. Ainsi, à travers son personnage exubérant, Donald Trump demeure très controversé et son imposance dans l’échiquier politique n’en est de ce fait pas moins dangereuse. Il n’en demeure pas moins une véritable banalisation de la conflation, phénomène tendant à créer la confusion entre plusieurs termes afin de manipuler les esprits.
Si les agissements de Donald Trump et de ses partisans ont des répercussions sociologiques et politiques, l’ensemble de la branche juridique en est davantage impactée, comme démontré jusqu’alors.
Donald Trump a banalisé les procédures de destitution mais a également profité de son pouvoir exécutif afin de nommer certains jurés de la Cour suprême, pouvant de ce fait lui porter faveur en cas de litige futur. Si ce semblant de conflit d’intérêts résultant de la nomination de jurés de la plus haute juridiction par un président est peut-être révélateur d’une faille dans le système judiciaire et politique des États-Unis, il constitue avant tout un grand danger pour la démocratie américaine, la partialité des jurés pouvant être remise en cause dans le cas ou un ex-président devra être jugé. Toutes ces actions, cumulées à la difficulté de certaines notions juridiques évoquées voire inventées, compromettent sérieusement la stabilité démocratique.
Enfin, trop de questions demeurent sans réponses : Comment distinguer l’immunité présidentielle, la présomption d’immunité, l’immunité présidentielle absolue ? Comment qualifier un acte d’acte officiel ? Finalement, n’y a-t-il pas un soucis d’interprétation et de subjectivité, laissant la détermination de ces expressions à l’appréciation des juges ?
La conclusion semble simple : Ne pourrions nous pas déduire que les États-Unis font face à une métamorphose sociétale juridique et politique, passant d’une séparation des pouvoirs vers une concentration des pouvoirs ?